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La philosophie Lean Startup

Une méthode dérivée du lean manufacturing, concept introduit chez Toyota au Japon à partir des années 50, est à l’origine de ces principes innovants. L’application de la philosophie Lean par Eric Ries, co-fondateur d’IMVU au processus d’innovation a débouché sur le Lean Startup. Les enseignements issus de son expérience de startupper lui ont permis de développer cette méthode, jugée contre-intuitive de prime abord.

En quoi consiste concrètement le Lean Startup?

Précisons en premier lieu que travailler dans un garage ne constitue pas la condition pour appartenir à une startup. D’après Eric Ries « est entrepreneur quiconque dirige une startup telle que je la définis : une structure commerciale destinée à concevoir de nouveaux produits ou services dans des conditions d’extrême incertitude ». Un entrepreneur peut se trouver partout, quelle que soit la taille de l’entreprise ou son secteur d’activité.

Quelle est la part de nos efforts qui crée de la valeur et quelle est celle qui entraîne du gaspillage ? Cette question est au cœur de la révolution du lean manufacturing. Apprendre à déceler toute dilapidation, puis l’éliminer systématiquement, a permis aux entreprises lean comme Toyota d’occuper une position dominante.

La philosophie lean définit la valeur comme un concept apportant des avantages au client. Or, dans une startup, on ignore quels sont les clients potentiels et ce qu’ils jugent important. Elle est en effet par essence confrontée à des situations d’une extrême incertitude. Tout ce qui ne contribue pas à apprendre comment créer de la valeur pour les clients est une forme de gaspillage.

Apprendre, tirer les leçons de ses erreurs, est la condition sine qua non de la progression de toute startup. C’est ce que Eric Ries appelle la « validation des enseignements ». Dans le modèle Lean Startup, chaque produit, chaque fonctionnalité, chaque campagne de marketing — autrement dit tout ce que fait l’entreprise — est compris comme une expérimentation dont le but est de parvenir à un apprentissage.

Au lieu d’élaborer des projets complexes basés sur une quantité d’hypothèses, il s’agit d’ajuster en permanence sa trajectoire grâce à la boucle de feed-back produire, mesurer, apprendre. Ainsi, on sait quand il est temps de pivoter, ou au contraire, s’il vaut mieux persister dans la même direction.

La vision demeure immuable. C’est la raison pour laquelle on se lève le matin, et n’a pas vocation à changer. La stratégie peut varier, mais pas trop fréquemment. Par contre, le produit évolue continuellement au fil du processus d’optimisation.

Nous avons évoqué la chasse au gaspillage : le principe consiste donc à lancer une société ou un nouveau produit avec le moins de capital possible. Au lieu de passer des années à développer un concept et un produit parfait, l’objectif est d’amener un prototype ou une version beta sur le marché aussi vite que possible. De plus, le cycle du produit doit être le plus court possible, entre les retours des consommateurs et les modifications apportées au produit. La tendance habituelle est plutôt à créer un produit le plus parfait possible avant de le mettre sur le marché, mais sans avoir de certitude qu’il va trouver son public. En cas d’échec, les pertes financières peuvent être très importantes, et il devient alors difficile de pivoter. Le Lean Startup consiste ainsi à moins dilapider le temps, l’argent et les ressources, afin de se consacrer à l’essentiel.

Le lean startup décrit un processus d’apprentissage en 3 étapes :
• Créer ou produire : basé sur une idée initiale, un MVP (Minimum Viable Product) est créé. Le produit est le plus simple possible. Il contient toutes les caractéristiques permettant de tester le concept. Aucune autre fonctionnalité n’est ajoutée. Il s’agit d’un prototype de test, pour valider l’idée initiale.
• Mesurer : dans cette phase, on observe attentivement comment les consommateurs réagissent au prototype et quels sont leurs retours. Tous les feedbacks sont évalués et serviront à concevoir la version suivante.
• Apprendre : le plus important dans cet apprentissage, est de découvrir si un changement fondamental de direction est nécessaire — un pivot — ou si le concept initial doit être ré-affiné. La prochaine étape consiste à concevoir un nouveau pilote à partir de ces enseignements, et à le faire passer à nouveau par les mêmes étapes.

Passer rapidement par ce cycle de 3 étapes, demeure essentiel pour ne pas rester dans une situation trop longue de conception.

À qui cela s’applique-t-il ?

D’après le fondateur, à n’importe quelle société, nouvelle ou établie. Nous avons vu plus haut que la taille n’avait pas d’importance. En ce point, je partage cet avis. La culture startup peut être introduite dans des structures importantes, moyennant des adaptations.

« J’imagine les principes du Lean Startup appliqués aux programmes gouvernementaux, aux soins de santé et à la résolution des grands problèmes du monde. » nous dit Tim O’Reilly, CEO d’O’Reilly Media. Je serai plus nuancée dans mon propos. Dans le domaine de la santé humaine tout d’abord, compte tenu de la réglementation concernant les procédures d’expérimentation et notamment d’essais cliniques, l’application des principes du lean startup sera plus complexe, voire inadaptée.

Quant à son utilisation par les gouvernements, penchons-nous sur un cas récent : l’Etat français a suivi des préceptes similaires à ceux de la philosophie Lean Startup dans sa gestion de la crise de la Covid. Mais cela n’a pas forcément été compris . Comme évoqué plus haut, ces concepts sont contre-intuitifs pour la majeure partie des gens.

L’univers logiciel est sans conteste le plus adapté, puisque c’est dans cet environnement que cette méthode a été inventée. Plus généralement, le principe convient pour les technologies, et pour la conception de produits en général, avec une application au cas par cas en santé. Enfin, dans le domaine des services, la philiosophie Lean Startup sied parfaitement. À titre personnel, j’utilise cette méthode dans ma société pour tester mes nouvelles idées de services auprès de mes clients cibles.

Marie-Laure Hisette

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